J’ai déjà décrit par le passé les effets physiologiques du stress. Mais vous pourrez toujours pour approfondir vous référer à ce site qui résume assez bien le processus : http://sante-medecine.commentcamarche.net/faq/1529-les-3-phases-du-stress.
Concernant notre pratique et sa mise en application en cas d’agression, on peut discerner 2 types de stress. Du stress positif et du stress négatif. Certes cela conduit à une réaction physiologique identique, mais les conséquences physiques d’une part et surtout psychologiques d’autre part peuvent s’avérer plus profondes, moins effaçables et transformer radicalement une personnalité.
Prenons un exemple parlant : le stress positif est celui que vous pourriez ressentir en saut en parachute lors de votre premier saut. Le danger est là, mais vous êtes ultra encadré. Il est donc fort peu probable que vous y restiez. C’est un stress réel, mais que vous avez choisi. A l’issue du saut, la conséquence psychologique est l’expérience intéressante et plaisante que vous en avez retirée. Cela ne laisse que des séquelles positives.
L’une des caractéristiques du stress est que le stimulus doit être plus élevé la seconde fois que la première pour atteindre un niveau de stress équivalent. Reprenons l’exemple du saut en parachute. Si vous avez sauté en tandem la première fois, vous avez ressenti un stress. Qui s’amoindrira aux prochains sauts en tandem et pourra même finir par disparaître. En revanche, le jour où votre instructeur vous dira de sauter seul, ce stress resurgira. Idem le jour où vous devrez ouvrir seul votre parachute pour votre première chute libre. Finalement, le stress s’estompe pour ne laisser la place qu’au plaisir. Raison pour laquelle on voit fréquemment, par exemple dans le milieu para, des gens prendre de plus en plus de risques pour maintenir le stress qui accompagne le plaisir, en faisant du base jump ou wing suit, ou dans le milieu de l’aviation certains passer à la voltige.
Une nouvelle fois, ce type de stress est positif car choisi.
Dans le cas d’une agression, le choix n’existe plus, sauf du côté de l’agresseur.
Ce qui se passe est de deux ordres : premier cas, il s’agit d’une discussion qui s’envenime et de quelque chose qui monte progressivement. Le stress apparaît aussi progressivement (en corrélation vous pourrez relire l’article sur le concept de zone d’incertitude http://wp.me/p2W1Zj-4C ). Vous sentez l’adrénaline parcourir vos veines, vous avez des sueurs froides et toutes les autres manifestations du stress. Vous sentez votre organisme réagir. Le cerveau prépare l’organisme à la fuite ou au combat. Vous pouvez alors réagir, sur-réagir ou être paralysé. Ici votre réaction et son efficacité dépendront du degré d’habitude que vous aurez de ce type de situation et de votre capacité à gérer ce stress. Deuxième cas de figure, l’agression survient par surprise. Vous n’avez ni le temps d’avoir peur, ni le temps d’être stressé (l’adaptation psychologique présente un temps de latence). D’où parfois des réactions de personnes qui ne bougent pas ou mettent un temps à réagir (vol à l’arrachée par exemple). Dans ce cas la peur, l’adrénaline, le stress n’arrivent qu’après l’agression. Le cerveau a besoin au préalable d’analyser la menace pour adapter l’organisme. Sur une agression rapide, en fait votre organisme sera inutilement prêt a posteriori.
L’efficacité du Krav Maga réside dans le fait d’ancrer des mouvements comme des réflexes, de discerner des signaux faibles, d’être en éveil. Cela ne signifie pas être paranoïaque, loin de là. Mais cela signifie que l’on analyse l’environnement avec beaucoup plus d’attention que le citoyen lambda qui insouciant se promènerait à 2h du matin dans un quartier peu éclairé en parlant fort dans son iphone. Grâce à la répétition encore et encore des mouvements appris, le cerveau, grâce à cet entrainement va être à même de donner des ordres plus rapidement. Je suis saisi par le cou et tiré vers l’arrière !? Je connais la réponse à apporter puisque je l’ai travaillée des heures durant à l’entrainement. Je réagis par automatisme, même si je n’ai rien vu, même si mon cerveau n’a pas analysé complètement la menace. L’entrainement et la répétition permettent d’éviter la paralysie qui peut survenir quand le cerveau ne sait finalement pas quoi faire d’autre après avoir préparé l’organisme, car on est dans le domaine du réflexe et non du choix d’une réponse à donner.
Nombre d’écoles qui « réinventent » le Krav Maga proposent de travailler en permanence sous un stress créé par des exercices visant à se rapprocher le plus possible d’une agression réelle. Même si je doute fort du bienfait de la méthode (apprendre sous stress est antinomique), cette méthode pédagogique crée un stress positif. C’est un stress où vous savez finalement que rien ne peut vous arriver réellement, d’autant plus que pour essayer de se préserver (quand même) généralement les pratiquants portent des casques, des plastrons et sont déguisés en bonhommes Michelin pour ne sentir aucun coup. Certes le plastron, le casque sont utiles sur de la mise en situation. Nous l’utilisons nous-mêmes parfois. Mais il est aussi utile de sentir les coups que l’on prend et ceux que l’on donne. Sentir que l’on donne des coups qui ne font pas mal permet d’améliorer notre technique. Le plastron nous renvoie le sentiment que l’autre ne sent pas le coup car il est protégé, et finalement parfois on peut se rassurer en se disant que notre coup est puissant, mais que le partenaire ne le sent pas car il porte un plastron. Alors même que l’on vient de donner un coup peu puissant. L’objectif du combat dur, tel que nous le pratiquons à la FEKM c’est de se rapprocher le plus possible d’une situation de combat réaliste. C’est la phase de stress la plus intense (positif car choisi) de la deuxième année du pratiquant. car en effet, le K.O. est possible, les coups étant portés à pleine puissance. C’est aussi le moment de la révélation : suis-je efficace dans la technique et le stress créé me permet-il d’en utiliser un minimum ?
Gardons bien cependant en tête que toutes les mises en situations, tous les combats durs, ne sont finalement utiles qu’à une chose : retarder le déclenchement du stress en ayant une « habitude » relative de combat. L’agression réelle, elle, dépendant de plusieurs paramètres, reste à des années lumières de tout ce qui pourrait être mis en situation lors d’entraînements, qui ne peut créer de stress négatif. Ce qui le crée, c’est que l’on ne maîtrise aucune des conséquences par avance avec certitude. C’est aussi la raison pour laquelle il est parfois très comique d’écouter des profs de fitness reconvertis en « instructor Krav Maga » présenter une technique en parlant de « la rue », quand la seule expérience qu’ils en ont est le chemin parcouru pour aller s’acheter leur créatine.
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